Heureux qui comme Laurène a fait un beau voyage…

Laurène Philippot est une voyageuse enthousiaste qui a choisi de vivre de sa passion. Depuis treize ans, elle parcourt le monde sous forme d’escapades qu’elle partage avec sa communauté.

Ce qui caractérise Laurène à la première rencontre c’est son grand sourire communicatif. La communication justement c’est son métier. Cette Bretonne installée en Alsace a choisi depuis douze ans de partager ses découvertes sur son blog, Carnet d’escapades.

Version moderne du carnet de voyage, le blog est devenu une manière de partager de façon interactive sa passion, ses conseils et cela dans des domaines aussi variés que les escapades citadines, nature, gastronomiques, sportives ou culturelles. Comme Laurène aime à le rappeler, « mon Carnet d’escapades est aussi varié que mes centres d’intérêt » !

Pour beaucoup d’entre nous, Laurène a un métier de rêve ! Pouvoir gagner sa vie en voyageant à vélo ou à pied reste un fantasme absolu pour les cyclotouristes que nous sommes. Pourtant, cela n’est pas de tout repos. Il s’agit d’un vrai métier ou le professionnalisme et le talent sont nécessaires. Retranscrire les émotions et l’enthousiaste que procure un voyage n’est pas donné à tout le monde. Essayons d’en savoir plus sur ce métier de « créatrice de contenus » par un échange avec Laurène.

Rencontre avec Laurène Philippot

Comment est née cette passion pour le voyage ?


J’ai voyagé un peu avec mes parents étant jeune et j’ai de bons souvenirs de ces voyages, mais je n’étais pas spécialement passionnée à l’époque. Tout a vraiment démarré en 2011, lorsque j’avais quelques mois de vacances entre la fin de mes études et le début de mon contrat de travail.

Je suis partie un mois avec un pass Interrail pour voyager en train en Europe avec ma meilleure amie, et je crois que c’est là que j’ai vraiment pris goût au voyage. Cette sensation de liberté, toutes ces découvertes et rencontres que nous faisions jour après jour… C’était grisant !

Aujourd’hui le voyage est devenu votre métier. Pouvez-vous nous expliquer comment cela est devenu possible ?


C’est arrivé vraiment au fur et à mesure. J’ai créé mon blog « Carnet d’escapades » en 2011, à l’occasion du voyage en Europe dont je vous parlais ci-dessus.
L’idée était simplement de garder une trace de cette expérience, alors j’ai acheté un appareil photo et ai créé un blog gratuit. Tous les soirs, je m’amusais à écrire sur la journée que nous avions passée en y ajoutant quelques photos. La seule personne qui lisait le blog à l’époque, c’était ma mère !

Lorsque je suis rentrée de voyage, je me suis dit qu’il serait dommage d’arrêter car j’avais bien aimé faire ce blog. J’ai donc continué depuis la Suisse, où je travaillais à l’époque et qui m’offrait un très beau terrain de jeu pour mes escapades ! Le blog a commencé à avoir davantage de lecteurs, puis a gagné le prix du « Meilleur blog de voyage francophone » aux Golden Blog Award en 2012, j’ai eu des demandes de partenariats de la part d’offices de tourisme…

Mais je n’envisageais pas à l’époque d’en vivre, j’essayais de concilier à la fois mon travail (en tant que fiscaliste, rien à voir !) et le blog, ce qui est devenu de plus en plus compliqué vu le temps que cela me prenait.

En 2015, j’ai fini par me poser la question de travailler sur le blog à temps plein. C’était une époque où assez peu de blogueurs étaient devenus professionnels et en vivaient, j’ai donc tergiversé quelque temps avant de me lancer. Que pouvait-il m’arriver ? Que cela ne fonctionne pas, mais j’aurais pu alors retourner à mon ancien métier ! J’ai donc décidé de sauter le pas. C’est à ce moment-là que j’ai créé mon second blog, « Mon week-end en Alsace », pour avoir un site plus local en plus de « Carnet d’escapades ». (j’avais à ce moment-là déménagé en Alsace).

Finalement, je n’ai jamais eu besoin de revenir à mon ancien métier : mon activité s’est bien développée et je ne regrette pas d’avoir sauté le pas. Je gagne ma vie via des contrats avec des offices de tourisme, de la publicité et de l’affiliation sur mes deux sites. Cela représente plus de travail que ce que l’on pense (non, aimer voyager ne suffit pas !) mais je suis passionnée par mon métier !

À la Fédération française de cyclotourisme, notre slogan est « À vélo tout est plus beau », cette phrase semble faire écho à votre activité ?


Comment ne pas aimer ce slogan ? C’est amusant, car je me dis régulièrement quand je suis sur mon vélo que c’est l’un des meilleurs endroits du monde… C’est la même idée, je trouve que l’on découvre les choses différemment à vélo. On a un peu de vitesse mais pas trop, on ne fait que peu de bruit, on entend les sons, on sent les odeurs, le soleil, le vent, la pluie sur sa peau… C’est comme si les sensations étaient démultipliées. Rien à voir avec des déplacements motorisés !

J’apprécie aussi beaucoup le rythme du vélo : il permet de couvrir assez de distance pour voir les paysages évoluer relativement rapidement, mais son rythme est suffisamment lent pour permettre d’en profiter tranquillement. Cela me convient particulièrement bien !

Quel est votre rapport au vélo ? Comment avez-vous débuté ?


J’aime bien faire du vélo depuis que je suis petite mais n’en ai jamais fait de manière sportive ou particulièrement intensive. J’ai beaucoup utilisé le vélo pour me déplacer étant enfant puis étudiante, fait un peu de VTT, il m’arrivait de louer des vélos ici et là pour faire une balade mais c’est tout.

Ma passion a vraiment démarré avec un voyage à vélo aux îles Lofoten en Norvège. Je ne sais pas vraiment comment mais je crois être tombée par hasard sur un article de blog de quelqu’un ayant fait la traversée des Lofoten à vélo et j’ai directement eu envie de faire ça. Mon mari étant partant aussi, nous avons fait ainsi notre premier voyage à vélo, en louant des vélos sur place. Nous en sommes revenus l’un comme l’autre enchantés et avons par la suite fait plusieurs voyages à vélo ensemble (le prochain est d’ailleurs prévu cet été !).

En parallèle, j’ai aussi commencé à proposer de plus en plus ce genre de collaborations axées « vélo » aux offices de tourisme avec lesquels je travaillais car je trouve que c’est un formidable moyen de découvrir un territoire, à la fois respectueux de l’environnement, agréable, permettant de faire des visites et des rencontres…

Il se trouve en plus que les gens ont redécouvert le vélo après la période Covid, et j’ai donc eu de plus en plus de demandes dans ce sens puisque les territoires se développent sur cette thématique. Voilà qui me convient particulièrement bien, et je fais ainsi régulièrement des voyages à vélo seule dans le cadre de mon travail.

Votre plus beau souvenir à vélo ?


Je crois que mon plus beau souvenir à vélo est l’année dernière, lorsque j’ai parcouru l’itinéraire Munich – Venise à vélo. Ce parcours est incroyablement beau et je m’extasiais vraiment chaque jour de découvrir tant de belles villes et paysages. J’ai un souvenir particulièrement magique des journées passées dans les Dolomites : pédaler avec vue sur ces montagnes magnifiques, quelle chance !

Les femmes sont de plus en plus présentes dans le cyclotourisme, mais nous ne sommes pas encore à une parité. Quel est le frein selon vous ?


Cela progresse, mais j’ai l’impression que les femmes ont souvent tendance à se censurer elles-mêmes, du fait de l’éducation et de l’image des femmes que notre société véhicule. Je le constate dans les questions qui me sont souvent posées par les femmes, que ce soient mes lectrices ou des femmes rencontrées par hasard.

D’une part, il y a la peur d’oser se lancer, de voyager seule : cette idée étrange (encore assez répandue !) qu’il vaut mieux qu’un homme soit avec nous ! Je ne dis pas qu’il ne faut pas faire attention en général, loin de là, mais je pense que l’on peut trouver un équilibre entre être vigilant et oser se lancer.

D’autre part, je remarque un manque de confiance en soi sur le physique : là où les hommes vont en général moins se poser de questions, nous autres femmes avons vite tendance à nous dire que cela va être trop dur pour nous, que nous n’allons pas y arriver… et même à avoir des réticences vis-à-vis de l’effort physique, comme si ce n’était pas pour nous de transpirer et de souffler sur un vélo… ! 

Je vois d’ailleurs souvent en voyage des couples avec l’homme à vélo « musculaire » et la femme à vélo à assistance électrique et me demande bien souvent ce qui a profondément motivé ce choix. Je n’ai rien contre les VAE qui peuvent être utiles dans bien des cas mais j’ai régulièrement l’impression qu’ils sont parfois choisis par les femmes qui se mettent des barrières et se disent directement qu’elles n’arriveront pas à suivre leur mari alors qu’elles n’ont pas vraiment essayé.

Peut-être que certaines auraient pourtant pris goût à davantage d’effort physique en s’autorisant à essayer… Et auraient par la même occasion constaté qu’elles peuvent tout à fait suivre leur compagnon !

Votre public est composé à 60 % de femmes, pensez-vous avoir ouvert une voie ou créer des vocations ?


D’une manière générale, les blogs de voyage ont un lectorat assez féminin. Vous savez pourquoi ? Parce que les femmes sont en général les organisatrices des voyages au sein des couples ! Cela semble cliché mais c’est vrai…

Je ne pense pas ouvrir une voie, bien d’autres femmes s’en sont chargées avant moi, mais je sais d’après les messages que je reçois que j’incite régulièrement les gens en général à voyager à vélo. Cela me fait toujours extrêmement plaisir quand on me dit qu’on s’est lancé sur tel ou tel itinéraire pour son premier voyage à vélo après avoir lu un de mes articles, et que la personne en revient enchantée. Il n’y a pas de meilleure récompense pour moi !

Je pense aussi que des blogs comme le mien aident à montrer aux femmes (et aux hommes !) que l’on peut être « Madame/Monsieur tout le monde », se lancer et se faire plaisir. Je ne suis pas sportive de haut niveau ou aventurière, je propose des parcours accessibles. Et même si certains sont plus sportifs que d’autres, je mets toujours en avant le fait de pouvoir tout adapter.

C’est l’un des grands avantages du voyage à vélo aussi : il suffit de réduire le nombre de kilomètres par jour si l’on sent que cela fera trop, par exemple ! Le voyage ne sera pas plus beau parce qu’on fait plus de bornes ou qu’on accomplit un exploit sportif (ce pourrait même être plutôt le contraire !).

Votre slogan est « Il n’est pas toujours nécessaire de partir loin pour être émerveillé… ». Quelle est la région de France ou proche de chez vous qui vous émerveille ?


Je vais être super chauvine, mais je dois dire que l’Alsace, où j’habite, m’enchante toujours autant ! C’est une belle région qui mêle des paysages variés, de jolies villes, où la culture est très présente… Et en prime, l’Alsace est particulièrement bien dotée en pistes cyclables. C’est un paradis pour les cyclistes (attention je compare aux autres régions de France, pas à des pays qui sont bien en avance sur nous comme les Pays-Bas ou l’Allemagne !).
 
Si vous cherchez un premier voyage à vélo à faire en Alsace, je ne peux que vous conseiller de parcourir la « Route des vins » à vélo, c’est un enchantement ! De mon côté, je découvre encore chaque année de nouveaux parcours dans toute l’Alsace, c’est un vrai plaisir.

Le vélo n’est pas votre seule passion, vous pratiquez aussi la randonnée pédestre et la course à pied. Comment arrivez-vous à concilier tout ça ?


Il faut bien varier les plaisirs et ces activités se complètent bien. J’aime être au contact de la nature et ces trois activités me le permettent. Il n’est pas trop difficile de tout concilier puisque je ne fais rien à haut niveau : je fais au gré de mes envies, des endroits où je suis, des opportunités… Et je prends toujours mes chaussures de trail avec moi, même sur mon vélo !  
 

Comment vous voyez-vous dans dix ans ? Toujours à parcourir la France et le monde ou vous envisagez de poser vos valises ?


En fait, je pense déjà avoir posé mes valises. Je n’ai pas une vie nomade, je suis installée en Alsace avec mon mari. Je me déplace beaucoup, certes, mais pas forcément loin ni longtemps. J’ai aussi plusieurs mois par an où je suis vraiment posée à la maison. Ce rythme dynamique me convient bien, je dois juste veiller à m’accorder de vrais temps de pause pour me ressourcer.
C’est ma façon de vivre actuelle, et je n’ai aucune idée de ce qu’elle sera dans dix ans ! Je fais en fonction des opportunités, des envies… Je profite du moment présent, et on verra bien dans dix  ans ce que l’avenir me réserve.
 

En conclusion, comment nous pourrions inciter les gens à se lancer dans le voyage à vélo ?


D’une manière générale, je crois que les gens ont besoin d’être rassurés. Le voyage à vélo n’est pas réservé à une « élite » super sportive, on n’est pas obligés de parcourir 100 bornes par jour ni de dormir en bivouac pour être un « vrai » cyclotouriste, il est totalement accepté d’être à vélo électrique, l’organisation n’a rien de bien compliqué, on peut toujours louer le matériel, etc.

À chaque problème sa solution.
Un peu stressé ? On prépare bien son itinéraire ou on réserve un voyage clé en main par une agence.
Pas de matos ? On le loue, cela permettra de tester avant d’investir !
Pas l’habitude de faire du vélo ? On prévoit un nombre réduit de kilomètres par jour et on profite des moments où l’on est à pied par la même occasion !
On aime avoir un peu de confort ? On réserve des BnB ou des hôtels…

Le voyage à vélo est flexible et s’adapte à chacun, c’est toute sa beauté !

Pour découvrir l’univers du voyage de Laurène Philippot, rendez-vous sur https://www.carnetdescapades.com/

 
Texte : Jean-Pierre Giorgi – Photos : Laurène Philippot
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