Aventure : Olivia ou le désert dans la peau !
Voyager à vélo, dans des environnements plus grands que soi, est un apprentissage quotidien de lâcher-prise. Il semblerait que Push Bush n’échappe pas à cette logique. Avant même de prendre le départ à Swakopmund, un torrent d’émotions contradictoires est venu me submerger. Des émotions dont je n’ai pas su tout de suite quoi faire ; où les mettre, comment les transformer.
Alors que Gulliver perdait son « papa », le jour-même du départ officiel de Push-Bush, je retrouvais pour ma part, un potentiel frère que je recherche depuis maintenant vingt-cinq ans. Finalement, après tant d’années d’espoirs déçus et de recherches généalogiques infructueuses, il a fait irruption sur mon Whatsapp® et dans ma vie, de façon impromptue, alors que j’étais jusque-là totalement absorbée par un prochain départ important ; celui de Gulliver pour son périple namibien.
Mais, comment rester concentrée et investie dans le projet Push Bush, alors que des événements extérieurs viennent tout chambouler d’un instant à l’autre ?
Comment digérer une telle tristesse, associée du même coup à une telle déferlante de bonheur intense ?
Comment les faire cohabiter et les mettre au service de Push Bush ?
Je dois avouer que pendant 24 heures, j’ai senti le sol vaciller sous mes pieds, et mes certitudes prendre l’eau. Devais-je réellement partir, ou n’était-ce pas mieux de mettre directement le cap sur la Colombie, pour pouvoir enfin renouer avec mon passé, avec mon histoire ? De toutes façons, Yann Thomas, subitement emporté par une crise cardiaque, cadreur génial, passionné, enthousiaste et intransigeant, laisse Gulliver orphelin de son papa.
Qui, à part moi maintenant pour veiller sur cette machine, à laquelle je me suis attachée aussi promptement qu’infiniment ? À quoi bon lui imposer une aventure aussi exigeante, alors que personne ne veillait sur lui aussi bien que Yann ?
Le cerveau en fusion et les émotions à fleur de peau, c’est finalement sur Gulliver et au milieu du désert du Namib, que les choses se sont peu à peu apaisées pour moi.
C’est évidemment en menant Push Bush à son terme, en faisant voyager Gulliver à la hauteur de l’investissement de Yann, que je pourrai au mieux lui rendre hommage. Il a construit ce qu’il appelait affectueusement cette « machine infernale » qui me permet aujourd’hui l’autonomie sur terrain exigeant.
À nous de lui montrer, aujourd’hui, que nous sommes tous les deux à la hauteur de son travail, de son savoir-faire, de son savoir-être et de son savoir-penser.
À nous de faire de notre mieux pour mener Push Bush à son terme.
Et mon « frère » dans tout ça ?
Nous avons convenu de nous attendre encore quelques mois. Le contact est établi. Il ne se perdra plus. C’est une promesse.
Mais, avant de me précipiter sur les traces de mes origines, l’Afrique m’ouvre grand ses portes pour que je puisse explorer la terre de mes ancêtres. Le sentiment d’appartenance que je ressens ici, au contact des gens ; au contact de la terre est bien réel. Il est temps pour moi, d’aller explorer ce sentiment, grâce à l’aide bienveillante du désert.
Si la dernière semaine, passée au cœur du désert du Namib, m’a appris quelque chose, c’est que tout prend du temps. Les kilomètres défilent lentement, à la vitesse de 8 km/h. Les distances sont immenses ; l’horizon lointain. Le sentiment de solitude, dans cet environnement, cohabite assez naturellement avec un sentiment de plénitude. N’est-ce pas exactement-là ce que je ressens quant-au départ précipité de Yann et à l’apparition tout aussi précipitée de mon « frère » dans ma vie ?
Mais, à 8 km/h, la précipitation est mauvaise conseillère. Il faut prendre le temps d’accepter les diverses émotions qui surgissent, de les laisser infuser, de les laisser s’incarner.
C’est là, tout l’effet que le désert a sur moi. Petit à petit, il me marque au fer rouge. Au fur et à mesure, je l’ai dans la peau. J’apprends à son contact.
Dépassée la sidération et le chamboulement, j’accepte la présence de mon « frère » dans ma vie, ainsi que l’absence de Yann.
Je n’ai parcouru qu’environ 550 kilomètres sur les pistes namibiennes, et déjà j’apprends une multitude de choses au contact du désert.
J’en avais l’intuition ; j’en ai aujourd’hui la certitude : Push Bush ne sera pas anodin dans mon parcours. Il y a quelque chose de fondateur dans cette itinérance.
Merci !
Vous souhaitez apportez votre soutien à Olivia ? Vous pouvez l’encourager à distance via son blog et ses réseaux sociaux : https://www.yvesetolivia.com/