À Vélo… Panama-Darien

Du 13 février au 26 février 2016 Nous retrouvons Patricia et Christian pour un nouvel épisode en Amérique Centrale.
La Panaméricaine .
L’entrée au Panama s’effectue rapidement. Nous avions lu qu’il fallait fournir un justificatif de solvabilité ou un billet d’avion de sortie… Rien ne nous a été demandé. Nous attaquons ainsi rapidement notre dernier pays d’Amérique Centrale
Trente-septième épisode. * À suivre.

Pour rejoindre la capitale, il n’y a guère que la Panaméricaine. Cette route qui traverse les Amériques du Nord au Sud. Jusqu’à présent, nous avons réussi à l’éviter, mais ici, pas le choix, nous devons rouler sur cette 4 voie pendant 600 km. Heureusement pour nous, la première partie est en travaux. Sur plus de 100 bornes, la « future » Panam nous appartient. Pour le reste, nous roulons sur le bas-côté. Nous quittons la route uniquement pour aller planter notre tente. En franchissant le pont des Amériques, nous passons officiellement en Amérique du Sud.

Panama City.

De l’autre côté du pont, se trouve la capitale du pays. Les nouveaux quartiers dominent les barrios anciens. A notre arrivée, tous les hôtels que nous visitons affichent complet. Par chance, l’un d’eux nous propose la « salle TV », en attendant que deux lits se libèrent en dortoir. Soulagés, nous pouvons profiter de la ville. Casco Viejo, le quartier colonial où nous logeons abrite quelques vieilles églises et vieux bâtiments en ruine. Un peu plus loin se trouve le marché aux poissons. Agréable et vivant, on peut se régaler de ceviches (mélange de fruit de mer) pour presque rien. Arrive le quartier moderne qui fait ressembler Panama City à Manathan. Des gratte-ciel à perte de vue. Marco, un chauffeur que nous rencontrons, nous explique que tous ces immeubles sont vides. Ils abritent uniquement des adresses postales pour les grandes entreprises mondiales en quête de paradis fiscal…. Le Canal de Panama. L’activité principale de la région est une ressource non négligeable pour le pays. Le canal de Panama permet depuis 1904 aux bateaux de toute taille de rejoindre le Pacifique à l’Atlantique (ou inversement) sans avoir à contourner le continent sud et le passage du Cap Horn. Pour permettre le passage de bateaux encore plus gros, un deuxième canal est en construction en parallèle du premier. Un troisième canal serait en projet au Nicaragua, financé par la Chine et la Russie. Accoudés au restaurant de Miraflores, nous regardons les manœuvres permettant aux cargos de passer les écluses. Impressionnant, car il n’y a pas énormément de marge de chaque côté. Le simulateur de passage, du petit musée, nous en donne un bon aperçu.

Le Darien

Pour rejoindre le continent Sud-Américain, il n’y a pas de route. La Panaméricaine s’arrête quelques 200 km plus loin. Bloquée par la jungle du Darien. Depuis notre départ, ce passage hante nos esprits. La machette récupérée au Guatemala qui pour le moment ne servait qu’à me curer les dents ou éloigner les chiens un peu trop amoureux de nos mollets allait enfin servir… Même si d’autres cyclos voyageurs, (la famille Hervé, André Coadou), ont déjà traversé cette jungle, ce n’est pas si simple. Pour pénétrer dans le Darien, en plus d’autorisations officielles, il faut une sacrée connaissance de cette nature inhospitalière. Plantes, animaux, rivières peuvent vite devenir des ennemis… Sans sentier, ni même trace précise, il est extrêmement facile de s’y perdre, ou de tomber sur des guérilléros, des narco trafiquants et autres pilleurs… Devant ces problématiques et n’ayant pas l’envergure d’un Indiana Jones, nous étudions les autres possibilités… L’avion, la croisière ou le long de la côte en empruntant diverses embarcations… Cette dernière option, est un peu plus engagée que les deux premières mais surtout beaucoup moins coûteuse. C’est l’option que nous retenons.

Le bouchon sur une coquille de noix.

Nous quittons Panama city un dimanche. Pour notre plus grand plaisir, c’est le jour où la ville est rendue aux vélos, marcheurs, rollers… Il nous est donc facile de quitter la capitale en empruntant les autoroutes. Nous sommes sur la côte Pacifique et il nous faut maintenant rejoindre la côte Caraïbe. Pas très éloignée. Mais il faut couper l’épine dorsale qui relie les deux continents par une route aux pentes reléguant les cols du pays basque au rang de faux plats. Des pourcentages équivalents à des pistes noires de ski. En gros, c’est super raide et même en osant « tout lâcher » dans les descentes, on ne récupère que quelques mètres dans la montée suivante. Ensuite, il faut pousser… Ce qui laisse le temps aux singes de nous regarder passer. Finalement, on arrive à Carti. Petit port des Caraïbes. Bien tranquille. C’est ici que commence un jeu de patience. Y aura-t-il une lancha (petite embarcation) pour notre destination ? Faut-il rester sur ce port ou rejoindre une île plus touristique ? Les personnes du port n’ont pas la réponse. Nous sommes trop fatigués pour prendre la décision de bouger et plantons notre tente. Dès 8 heures du matin, le port s’anime. Les puissants 4×4 qui eux seuls arrivent à passer la route de la veille arrivent de Panama déversant leurs passagers désireux de regagner leurs îles. Sur le ponton, il nous faut trouver la bonne lancha. Par chance (?) ce jour-là, il y a une embarcation en direction de Puerto Obaldia, dernier village du Panama où se trouve le bureau d’immigration. Les bagages, vélos et passagers sont vite embarqués. Avec nous, 16 personnes, des poulets, des bouteilles de gaz, des caisses, 2 vélos et d’innombrables sacs. Les occupants du bateau connaissent les conditions et tout est bien emballé dans des sacs poubelles. Le « capitaine » met le cap sur la station-service. Il a l’air soucieux et rajoute un baril de 80 litres d’essence. Tranquillement, l’embarcation contourne les îles San Blas, paradis des Caraïbes. Certaines sont habitées, d’autres sont encore désertes. Une fois quittée la protection des îles, le cauchemar commence. Bien que des Caraîbes, la mer est démontée. Les vagues énormes nous chahutent dans tous les sens. Le bateau ressemble à une coquille de noix sur un océan en colère. Le bateau sort de l’eau, retombe lourdement derrière chaque vague. Nous ne voyons pas l’horizon, mais que des vagues immenses. Dans l’embarcation personne n’a le courage d’être malade. Seuls quelques cris s’échappent quand le bateau retombe nous brisant le dos à chaque fois. Nous avons le regard rivé sur nos vélos. Ils ne ressortiront pas indemne de cette traversée, c’est certain.

Nous arrivons en vue de Puerto Obaldia. La traversée aura durée 7 heures au lieu des 4 annoncées. Le « capitaine » semble encore plus soulagé que nous. Nous ne pouvons pas nous approcher de la plage pour accoster le bateau. Le « capitaine » invoque un problème de moteur et demande la permission de s’accrocher aux bateaux de l’armée. Il nous faut traverser trois bateaux avec nos vélos et nos bagages avant d’atteindre le quai. Dès le pied posé sur la terre, le verdict tombe. Le vélo de Patricia est dans un sale état. Dérailleur plié, patte dessoudée, roues en 8, porte-bagages cassés… De plus, nous arrivons trop tard. La douane est fermée. Nous devions juste faire une halte pour tamponner notre sortie du Panama et rejoindre Capurgana, premier village de Colombie. C’est ce que nous avions négocié avec le « capitaine ». Nous passerons la nuit devant le poste d’immigration, avec des réfugiés Cubains qui attendent, pour certains, depuis des mois une autorisation de passage au Panama. Gentiment, ils nous invitent à prendre une douche, à nous reposer, à découvrir le village…. En écoutant leur parcours et leur vie, nos problèmes mécaniques ne sont pas grand-chose. Le lendemain, une fois obtenu le tampon du Panama, il faut passer par la case Douane. Ici, il ne rigole pas. Chiens renifleurs, tous les bagages fouillés méticuleusement. Nous assistons à la scène. Valise ouverte, chaque poche de pantalon est vidée, doublures sondées… Nous pensons à nos 10 sacoches à étaler sur cette table… Devant cette réalité, nous contournons le poste en empruntant les chemins visités la veille avec les cubains et évitons la fouille…. Un peu plus loin, sur une plage, des lanchas sont chargées en silence. Nous retrouvons notre capitaine, qui contre toute attente est prêt à nous emmener à destination. Ce n’est pas le même bateau que la veille. Quand je lui fais remarquer, il me répond que hier, le bateau, notre bateau s’est fendu sur toute la hauteur pendant la traversée, avant d’ajouter que grâce à dieux nous avons pu atteindre Puerto Obaldia…. Si nous avions su qui était aux commandes…. Pour cette dernière traversée, ce n’est pas lui qui conduit la lancha. Il est redevenu aide, afin de gagner assez d’argent pour réparer sa coquille de noix et rentrer chez lui aux San Blas…. Pour nous, il aura tenu parole, c’est ce qui nous importe. La présence de deux touristes à son bord est-elle un atout pour lui et sa marchandise ? Assez tranquillement nous arrivons à Capurgana. Le temps de descendre nos vélos et nous croisons Retief, un cyclo Sud-Africain avec qui nous avons roulé au Mexique. Il est enchanté de son option « croisière » …. Nous n’en saurons pas plus, son beau bateau part pour Turbo. Les formalités d’entrée en Colombie ne sont que des formalités. Plus de bateau aujourd’hui pour le continent. Nous abandonnons le camping et cherchons un petit hôtel. Il nous faut réfléchir à la suite. Première chose, trouver un bateau pour le continent. Le lendemain il y a une lancha pour Turbo. Le surlendemain, un catamaran énorme pour la même destination. Nous n’hésitons pas et réservons le gros bateau. Ras le bol des coquilles de noix. Cela nous laisse un jour et demi pour remettre le vélo de Patricia en état. Capurgana est une ville qui n’est accessible que par la mer. Du fait, cela fonctionne comme sur une île. Tout le monde est très rapidement au courant de tout. C’est comme cela que nous rencontrons le soudeur des machines CAT servant à entretenir la minuscule piste d’atterrissage du village. Rendez-vous est pris pour le lendemain. Nous pouvons passer le reste de l’après-midi à visiter cette bourgade sans voiture, où les gens sont vraiment agréables. A neuf heures, je suis au rendez-vous. Malheureusement, Osias, c’est son nom, ne peut plus m’aider. Il a une urgence avec un appareil tombé en panne la veille. Que cela ne tienne, à l’autre bout du village, il y a une autre personne qui possède un poste à soudure. Je monte à l’arrière de la première mobylette qui passe et me fait conduire chez Carlo qui, moins expérimenté que son collègue, fini après quelques trous et pas mal de sueur à ressouder les parties endommagées. Le voyant sortir la masse pour redresser les portes bagages, je le remercie gentiment et fait de mon mieux à l’auberge. Résultat final le vélo pourra repartir. Gros soulagement pour nous deux. Par contre, nous serons obligés de finir en Lancha… Le Catamaran est bloqué pour une durée indéterminée car ses papiers ne sont pas en règle à Turbo…Il est plus que temps de rejoindre le continent. Nous avons soif de montagnes, et de fraicheur. Comme le disait Los lobos : No soy marinero… baîla bamba… Aujourd’hui, nous quittons Turbo. Le voyage s’est bien passé. Nous sommes sur le continent Sud-Américain. Nous laissons derrière nous le Pacifique et l’Atlantique. La prochaine fois que nous verrons la mer, nous aurons bien avancé…

À suivre * Ce sont les paroles et photos de Patricia et Christian que vous retrouvez tout au long des reportages.
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