Un cyclomontagnard vous raconte son Brevet de Randonneur des Alpes 2017
Dormir avant un BRA , c’est mission impossible. Dans le temps, on pouvait même partir à une heure du matin pour les tandems et les machines bizarres… De nos jours, on ne fait pas cette différence, mais c’est quand même à trois heures du matin ! En rétroactif, levé un peu avant deux heures après une nuit qui se termine avant d’avoir commencé. Fin du bal musette à Vizille et du feu d’artifice vers vingt-trois heures trente, quelques orages qui nous tournent autour depuis cet après-midi…. Il s’agit donc d’un cours sommeil et d’un seul œil, si on veut éviter de se lever à neuf heures du matin. On ne sait jamais, la panne de réveil ça n’existe pas que dans le boulot ou le jour du BAC… La pluie redouble vers une heure du matin juste pour nous inquiéter un peu plus… Partir sous la pluie, ce n’est pas drôle ! La météo avait des prévisions changeantes et je me suis demandé si ce n’était pas une météo pour touristes : pluie le vendredi, pluie le lundi et beau temps le samedi et le dimanche. Il faut vraiment y croire ? Mais, au final, la prévision ne sera pas si mauvaise que ça. Il ne restait à connaitre que le lieu et l’heure de la dernière salve d’eau tant attendue par les cultivateurs et les jardiniers passionnés. Ce sera donc à une heure et ensuite plus rien pour les cyclotouristes, ni avant le samedi, ni après le dimanche !
Le fort orage du vendredi soir avait eu pour résultat de décaler les festivités de la ville de Vizille, juste assez pour nous inviter au feu d’artifice qu’on aura vu en rêve éveillé, imaginant les couleurs et les formes au rythme des coups de canons, depuis le fond du lit, au lycée. Nous sommes accueillis par Denis, l’homme qui se démultiplie, car il était aussi au contrôle des bicyclettes le matin et au carrefour du Lac du Chambon, sécurité oblige. Merci à Denis et à tous les autres bénévoles du CTG, le club des cyclotouristes grenoblois, qui porte l’organisation de cette cyclomontagnarde.
Lever de soleil avec mon vélo au cœur de la montagne !
Nous voilà donc au départ avec un camarade de club qui a débuté avec moi en 1969. La photo s’imposait, il a fallu la refaire trois fois car avec les gilets réfléchissants c’était encore un feu d’artifice pour la pellicule électronique. Trop de sécurité tue la photographie !
Et voilà c’est parti pour les Grandes Alpes…… La nuit est douce et cette douceur restera une des caractéristiques de cette édition qui oscille trop souvent entre le gel dans les hauts Cols et la fournaise dans les fonds de vallée. De ce côté-là, par rapport à d’autres éditions on a vraiment été gâtés !
J’avais opté pour un petit braquet type tour de roue de 700 C et je ne regrette pas ce choix. Je suis arrivé en haut du col de la Croix de fer dans un état de santé excellent, juste assez pour une bonne collation. Le peu de victuailles dans ma sacoche ne servira à rien. C’était juste un encas de sécurité, car je sais que maintenant on peut se rassasier suffisamment avec les nombreux points d’accueil sur le parcours. Il faut dire aussi que cette randonnée c’est 140 kilomètres, et ensuite que de la descente si on ne gravit pas les « cols options » réservés aux gourmands…
Nous avons pu assister au lever de brume et de soleil sur les pentes de ce premier col. On a pu aussi observer la traite des vaches de la montagne toujours au même endroit et à la même heure depuis tant d’années. Je me pose d’ailleurs la question de savoir si ce sont les mêmes vaches (elles ne peuvent pas avoir l’âge du BRA) ? Mais les cloches qui teintent à leur cou vraisemblablement sont les mêmes !
J’ai eu assez froid dans la descente compte tenu de la sudation et du soleil encore un peu timide. Après la Croix de Fer, j’évite le col du Mollard que j’ai déjà grimpé dans les deux sens et aussi a tandem et vice et versa. Il y avait déjà bien longtemps que je n’étais pas descendu directement sur Saint-Jean de Maurienne… Encore une collation avant de se lancer dans le Télégraphe, un col qui ne paye pas de mine mais qui m‘a déjà bien esquinté autrefois pour l‘avoir gravi trop vite. Cette fois, ce fut fait très tranquillement : j’ai cheminé les 12 km sans arrêt et sans essoufflement, avec juste un peu de force musculaire.
Si j’ai été souvent doublé dans ces deux premiers cols, je m’amuse de voir certains « rapides du braquet » s’arrêter et trouver tous les prétextes pour cela. C’est certainement pour avoir le plaisir de me doubler plusieurs fois et être éblouis par mon vélo qui fait l’objet de félicitations de certains admirateurs et de quelques photographes … Donc, avec mon petit rythme, je plonge directement et sans mollir sur Valloire vers le point d’accueil attendu par certains avec grande impatience pour ne pas dire anxiété.
Le Galibier : maître des lieux impressionnant !
Ce dernier accueil avant la grimpée du Plan Lachat est placé au bon moment et au bon endroit. Une petite collation suffira pour se lancer dans le Galibier. Comme disait Vélocio : « des haltes courtes et rares… » et c’est reparti !
Les choses changent un peu, voilà le vent qui se réveille et je vois que le compteur passe facilement du 8/9 km/h au 6/7 km/h. Il faudra donc un peu plus de patience et de philosophie pour avancer en admirant le massif qui se heurte à nous. Nous passons des alpages aux roches lunaires, le paysage reste splendide et impressionnant. Du haut du premier lacet terrible qui annonce le grand col, on voit en dessous les minuscules cyclotouristes avancer comme des escargots. Du haut de notre promontoire, nous avons l’impression d’être plus forts et plus rapides alors qu’en vérité c’est pour tous la même lente procession !
On est loin des pédalées du Tour de France vu à la télé quelques jours avant où les cyclistes avalent la montagne. Notre satisfaction : on voit le splendide panorama, les tractions Citroën rutilantes, les Harley pétaradantes qui polluent le calme de la montagne. On entend siffler les marmottes qui ne semblent pas dérangées par les hordes de touristes, comme si elles nous disaient bonjour au passage… Mais pour les voir c’est une autre paire de manche tant elles sont confondues dans la roche qui nous entoure.
J’ai calé un peu pour un arrêt salvateur de 2 minutes au bout de 4 km, puis un autre à 500 m du sommet pris par une rafale de vent plus forte que prévue. Mais j’ai relancé pour aller au sommet, où je m’offre un coup de fil, chose impossible il y a plus de 40 ans ! J’ai plongé ensuite vers l’autre bout du tunnel, que j’avais emprunté lors d’une session de ce BRA il y a fort longtemps pour encore une collation ! Je pense que les organisateurs ne veulent pas voir de cyclotouristes affamés sur leur belle manifestation historique comme la nomme notre ami Jules ? Ils nous reste maintenant la longue descente bien méritée vers Vizille . J’avais envisagé aussi de faire le Sarenne mais j’ai préféré rester sur mon histoire avec le BRA classique sans être trop gourmand d’options. Et puis, j’avais donné rendez-vous à ma fille, Alexandrine, à Bourg d’Oisans qui, en famille, faisait la randonnée du jour… Je profitais alors de cette descente sans excès de braquet avançant sans forcer avec un vent de face très costaud. J’ai été doublé par des hordes de cyclistes grisés par la pente et emballés par leurs braquets imposants. Pour moi, la descente c’est la récompense du cyclotouriste et je ne vois pas l’intérêt de ne pas admirer le massif de la Meije tant que son glacier est encore là. Je ne leur jette pas la pierre car, plus jeune, je me souviens avoir relié Grenoble en 2H30 par cette même route filante…
Alexandrine nous pilotera vent debout jusqu’à Vizille en une heure dans un rythme d’une régularité exemplaire. Après ce dernier accueil, nous avons filé à côté d’une circulation automobile dense, sur la piste cyclable. Certains, dans leur voiture, devaient regretter de ne pas être pour un instant seulement sur un vélo.
Nous voilà donc de retour au point initial, en bonne forme, après cette pédalée tranquille et salvatrice ! On retrouve les amis éparpillés dans les options du BRA : Carmen qui officie avec les officiels, Jules est à mes côtés, Yves descend de la montagne juste pour boire le pot de l’amitié…malin notre ami toubib, ou fin calculateur ? Nous avons tous abandonné Denis à son carrefour en espérant secrètement qu’il termine les travaux pour la 50e édition du BRA en 2019. J’y reviendrai encore si la santé est toujours de la partie ! Mais cette fois, je ferai comme il y a 4 ans : camping dans mon bon lit confortable et loin des festivités, pourtant appréciées, de Vizille , avec son maire toujours présent à la clôture du BRA avec le Conseil départemental !
Rendez-vous donc dans deux ans pour un nouveau BRA, qui mérite encore plus de participants !