La Saône à vélo du nord au sud (1/2)

Descendre à Lyon depuis les Vosges en suivant la Saône en couple et en vélo : Quelle aventure ! Et c’est celle qu’a tenté Bernard Defranoux avec son épouse. Il nous raconte leur périple au fil de la Saône.

La genèse d’un voyage à deux


Nous sommes un couple de soixantenaires qui a toujours pratiqué le vélo, comme tous provinciaux,  avec plus ou moins de régularité. Le vrai départ des « vacances à vélo » a été notre parcours A/R le long du canal du Midi en 2013.

Puis l’année d’après nous avons passé une semaine de vacances en immersion dans le marais poitevin. Enfin avec la retraite et le temps libre que celle ci procure, nous avons participé en 2018 à l’organisation de la Semaine fédérale (SF) à Épinal, chef-lieu de notre département. Mon épouse côté administratif et moi à la commission logistique : montage, gestion, et démontage du camping fédéral ! Gros travail.

 
Tout naturellement, nous avons voulu découvrir la SF en tant que participant et de ce fait nous avons passé, en août, une semaine à Cognac. Ce qui a été pour nous l’occasion de souscrire notre première licence de vélo. Peut-être irons-nous à Valognes en 2020. Forts de ces différentes expériences, nous envisageons de plus en plus de partir en vacances avec nos vélos. Que nous pouvons qualifier de : liberté et convivialité.

Je ne sais pas pourquoi j’avais depuis des années l’envie de faire ce voyage. Peut-être était-ce parce que nous avions fait le canal du Midi et le Marais Poitevin il y a quelques années. Ou notre participation à la Semaine fédérale de cyclotourisme à Cognac cette année. C’était peut-être aussi le fait que la Saône prenne sa source dans mon département de naissance. Toujours est-il que nous avions envie de faire ce périple.

Nous avons l’équipement : pour moi un VTC Nakamura. Pour mon épouse, un VAE Moustache dernière génération. Et pour transporter nos bagages, une remorque BOB (dont nous reparlerons plus tard) qui nous a déjà accompagnés par le passé. Il nous suffisait maintenant de trouver une fenêtre météorologique favorable, entre la garde des petits enfants, les rendez-vous médicaux, et les réunions associatives. Ce sera donc un départ le 27 août 2019

 

Domicile > Vioménil > Corre / 83 km soit 7 heures dont 6 heures à vélo


C’est donc ce mardi 2 septembre vers 110 h que nous partons sous un soleil radieux. Nous avons 50 km à parcourir pour rejoindre la source de la Saône à Vioménil. Le moral est au beau fixe, nous avons accroché la remorque (poids total roulant 20 kg) au VAE de madame afin de m’économiser dans les premières bosses du départ. 

Malheureusement, au bout de 15 km, l’axe à blocage rapide (fourni par BOB et fabriqué dans de « l’acier de pot de camp ») de la roue arrière du vélo de madame cède et nous devons changer la remorque de vélo et c’est moi qui vais tracter les 20 kg tout au long du parcours ! Le moral a pris un pète mais il faut continuer (après coup, madame m’a dit que j’étais un tantinet irritable). Nous demandons notre route à un couple de cyclistes (routiers) de la région avec qui nous conversons quelques minutes et qui paraît très intéressé par l’aventure. Une question inquiète un peu la dame : « Vous ne vous engueulez pas trop ? » À laquelle je réponds sous forme de boutade : « On s’engueule moins en vélo qu’à la maison ! » On se quitte en espérant bien se revoir un jour.

Quelques kilomètres plus loin, à La Forge de Thunimont, nous croisons le canal de l’Est que nous retrouverons ce soir. Encore quelques belles montées et nous arrivons enfin à 437 mètres d’altitude à la source de la Saône au cœur du village de Vioménil. L’endroit est idéal pour pique-niquer au bord de ce ruisselet au doux clapotis.

Après s’être bien restaurés, il est déjà temps de repartir. Nous choisissons de ne pas suivre au plus près la rivière mais de prendre plutôt les petites départementales dans la forêt de Darney pour rejoindre Passavant la Rochère puis Corre où nous avons réservé notre première chambre d’hôte. C’est dans ce village que convergent à l’ouest la Saône, à l’est le Coney et entre les deux, le canal de l’Est prend fin laissant les bateaux voguer sur la rivière. Après un bon repas chez Max (seul restaurant ouvert au village) nous passons une bonne nuit chez Gaëlle, notre hôte, malgré le chant du coq qui a commencé ses vocalises à 4 h 30 !

orre > Beaujeu  – 98 km  soit 8 h 30 dont 6 heures à vélo


Sur les conseils de Gaëlle, nous préférons la rive droite à la rive gauche où les routes départementales sont plus bossues. Nous suivons ainsi la D44 en passant à Jussey puis nous croisons la Saône à Port d’Atelier et enfin nous empruntons la D20 jusqu’à Port-sur-Saône. Nous pédalons tranquillement et nous nous laissons distraire par le vol d’une quinzaine de cigognes qui, nous le supposons, se rassemble en vue de leur migration. Après le pique-nique de midi, nous commençons notre première piste cyclable rive droite appelée Échappée bleue® (très bien fléchée).

Nous quittons cette piste (sur 1 ou 2 km) uniquement pour contourner le tunnel de Saint-Albin qui évite aux bateaux une grande boucle et permet de compenser la déclivité du niveau d’eau.

En milieu d’après-midi après une pause réparatrice dans un bar de Ray/Saône où nous procédons à la recherche d’un hébergement, nous continuons rive droite avant de croiser la rivière à Autet pour gagner Beaujeu-Saint-Vallier, lieu de fin d’étape. Nous serons hébergés au Domaine des papillons. C’est une chambre d’hôte dans une ancienne dépendance hospitalière dont le calme et la beauté n’ont d’égal que la gentillesse de l’accueil des hôtes. De plus, nous y avons fait un très bon dîner. Et au petit-déjeuner, Dominique nous a emballé dans du papier alu ce que nous n’avons pas dégusté et que nous mangerons ce midi : vraiment sympa !

Beaujeu > Saint-Jean-de-Losne  – 86 km  soit 7 h 30 dont 5 heures à vélo


C’est parti pour notre troisième étape, les fesses commencent à être talées mais c’est en fin de journée qu’elles vont commencer à être les plus douloureuses, quand on ne cesse de changer de position et que l’on se met debout sur les pédales à chaque descente. Mais bon, tout cycliste connaît ces désagréments, et le dépaysement, ça se paye !

Nous traversons Gray-en-Ville, le long des quais et retrouvons la piste cyclable rive gauche. Nous découvrons les premières cultures de haricots flageolets (présentes jusqu’à Mâcon) sur des dizaines d’hectares et qui alternent avec le maïs et le tournesol beaucoup plus habituels. Nous nous arrêtons même pour en goûter directement sur le pied. La découverte est agréable.

Nous sommes tout surpris quand nous nous apercevons que nous sommes suivis à notre gauche par un jeune sanglier. Nous nous arrêtons mais la pauvre bête est enfermée dans un vaste domaine que nous imaginons être une réserve de chasse. À ce moment, je repense au chevreuil qui a déboulé devant ma roue avant, au matin de la première étape. Il était bien en liberté celui là !!! Vers Mantoche, nous rencontrons un cycliste un peu perdu.

John est un Australien de Perth qui effectue un périple en Europe d’environ 3 500 km entre l’Allemagne, la Suisse, Avignon, Bordeaux, Gray, la Bourgogne … Des rencontres insolites qui rapprochent les antipodes. Nous quittons la piste cyclable à Essertenne pour suivre la D976 jusqu’à Heuilley, ce qui nous prive de voir la confluence avec l’Ognon. Nous passons en Côte-d’Or où la piste est beaucoup moins belle, voire non enrobée à certains endroits (ce n’est rien à côté de ce qui nous attend en fin de parcours). Nous mangeons les victuailles de Dominique sous les arbres face au pont de Pontailler. Petit café au bar tout près et remplissage des bidons. C’est reparti rive gauche toujours en piste cyclable. Jusqu’à Saint Jean de Losne (prononcez : [lone]) plus petite commune de France (en superficie) de 0,6 km2 mais a contrario, mondialement connue par les plaisanciers et bateliers. Sa position géographique au croisement de nombreuses voies navigables en fait le premier port fluvial de France.

Nous sommes arrivés assez tôt et les personnes rencontrées ici et là nous invitent à découvrir la ville et à y passer la nuit ; ce que nous ferons aux Charmilles.  à deux pas du port dans une maison du XVIIIe siècle dont la façade ne laisse en rien présager de la destination du lieu. Là encore, au petit déjeuner, notre hôtesse nous invite à emporter tout ce qui reste de victuaille afin de nous restaurer en cours de route.

Saint-Jean > Saint-Loup  – 79 km  soit  8 heures dont 4,5 heures à vélo


Nous avons déjà fait environ la moitié de notre parcours. Nous traversons le pont et prenons tout de suite à droite puis à gauche l’EuroVelo 6 qui nous mènera jusqu’à Chalon sur une piste toujours aussi bien fléchée.

Dans le petit matin, j’aperçois au loin, un petit drapeau orange que je suppose être celui d’un cycliste et sa remorque. Cependant, il me semble que je rattrape mon objectif un peu vite. En effet, qu’elle ne fut pas notre surprise en découvrant Hans, pèlerin allemand qui parcours les routes européennes depuis 27 ans vers les sites religieux. En ce moment, il est sur la route de Saint-Jacques-de-Compostelle à raison de 25 km journaliers.

Nous arrivons à converser dans les langues de Goethe, Shakespeare et Molière mélangées ; un personnage haut en couleur qui mériterait d’être connu. Pendant notre conversation, Jean-Michel se joint à nous. Lui aussi effectue le même parcours que le nôtre, depuis Nancy et souhaite rejoindre son fils, étudiant en médecine à Lyon. Nous nous reverrons plusieurs fois au cours du parcours.

Le parcours n’est pas monotone, les paysages changent, la Saône est plus ou moins proche, à l’extérieur des méandres et là où le courant est moins fort, nous nous émerveillons des étendues considérables de nénuphars. Nous observons les familles de cygnes, souvent le bec immergé dans la vase à la recherche de leur pitance. On ne voit pas le temps passer et nous sommes déjà à Verdun sur le Doubs. Nous pique-niquons sous les arbres face à l’île du château entre Doubs et Saône. Quel bonheur ! Petit noir au café des sports puis nous empruntons le pont qui enjambe les deux rivières.

À droite, la confluence, à gauche la Saône qui semble avoir doublé de largeur. Le parcours se poursuit rive droite, sous une chaleur étouffante. Nous devons boire beaucoup, malheureusement, les points d’eau sont rares. Les fontaines publiques portent souvent (par précaution) la mention : eau non potable ou non contrôlée. On peut en trouver parfois sur les ponts d’amarrage des bateaux mais le plus sûr, amis cyclistes, ce sont les cimetières ! Il y a toujours dans ces endroits de repos un point d’eau à disposition. Nous sommes vite à Chalon sur Saône où nous nous arrêtons afin de trouver un hébergement. Ce sera ce soir « Les chambres claires » à St-Loup-les-Varennes, patrie de Nicéphore Niépce, inventeur de la photographie. Le cadre est calme, le jardin verdoyant et l’accueil chaleureux. 

 

À suivre dans la rubrique « Aventure » de Cyclomag

 

Texte et photos : Bernard Defranoux

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